Nathan et Jean-Baptiste, l’adoption pour toustes

Photo personnelle fournie par Nathan et publiée avec son accord.

Série Adopter en féministe, épisode 3.

Depuis le 17 mai 2013 et la promulgation de la loi sur le mariage pour toustes, l’adoption en France est ouverte aux couples de même sexe. Si de plus en plus de couples gays et lesbiens se portent candidat·es à l’adoption, un rapport présenté en 2019 par les parlementaires Monique Limon et Corinne Imbert fait état de discriminations qui visent encore, dans certains départements, les couples non hétéro souhaitant accueillir un enfant. Heureusement, certains arrivent à se frayer un passage. En 2019, Nathan et son mari Jean-Baptiste adoptaient Gaël, aujourd’hui âgé de 4 ans et demi, après cinq ans de démarches. Nathan assure que, dans leur parcours, leur orientation sexuelle « n’a jamais été un sujet ». Tandis que nous célébrons les 10 ans du pire cauchemar de la « manif pour tous », je me réjouis de partager son témoignage.

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Nous avons décidé de tenter notre chance

Je m’appelle Nathan, je suis éducateur spécialisé auprès de personnes en situation de handicap. Je suis marié à mon partenaire Jean-Baptiste depuis 2014 et, en 2019, nous avons adopté notre fils Gaël, aujourd’hui âgé de 4 ans et demi.

Avec Jean-Baptiste, nous avons toujours voulu devenir parents. Au départ, nous envisagions une GPA à l’étranger, mais nous avons renoncé pour des raisons juridiques, financières et logistiques. Lorsque la loi sur le mariage pour toustes a été promulguée, en 2013, nous avons décidé de tenter notre chance par le biais de l’adoption classique, même si nous étions plutôt défaitistes. En tant que couple gay, nous pensions que nous n’aurions pas la possibilité d’adopter en France, encore moins un nourrisson en bonne santé. D’ailleurs, au début, nous disions être ouverts à un enfant avec des besoins spécifiques ou un handicap, car nous pensions que c’était notre seule chance. Mais, par la suite, nous avons réalisé que nous ne nous sentions pas capables d’accueillir un enfant avec une pathologie. En tant qu’éducateur spécialisé confronté quotidiennement au handicap dans mon travail, je ne me sentais pas capable d’assumer cela en tant que parent.

Pour le reste, nous sommes passés par le cheminement classique de toustes les candidat·es à l’adoption. Après une première réunion d’information, nous avons eu plusieurs entretiens avec un travailleur social et une psychologue qui nous ont questionné sur nos motivations. Ils ont émis un avis favorable pour l’obtention de l’agrément à l’adoption, lequel nous a été délivré par le conseil de famille du Rhône (69), où nous habitons. Puis, les entretiens se sont poursuivis avec un autre travailleur social et une autre psychologue, dans le but de faire mûrir notre projet, de prendre du recul, de nous poser les bonnes questions concernant notre futur enfant, etc.

En tant que couple gay, nous pensions que nous n’aurions pas la possibilité d’adopter en France, encore moins un nourrisson.

 

Le fait que nous soyons un couple gay n’a pas influé sur le processus

Tout au long de notre parcours, personne ne nous a fait de remarques sur notre orientation sexuelle, ni les psychologues, ni les travailleurs sociaux. Nous étions étonnés car nous étions le seul couple homo dans notre groupe de parents adoptants, et nous étions persuadés que ce serait un frein. Bien sûr, notre configuration familiale a été abordée du point de vue de l’enfant, puisque Gaël va grandir dans une famille avec deux papas, et qu’il convient de l’accompagner au mieux dans cette différence, mais le fait que nous soyons un couple gay n’a pas influé sur le processus.

Finalement, Gaël nous a été confié en 2019, à l’âge de 2 mois et demi, « seulement » cinq ans après le début de nos démarches, soit un délai relativement court pour l’adoption d’un nourrisson en France. Après une phase dite « d’apparentement » d’ une dizaine de jours, durant lesquels nous nous rendions chaque jour à la pouponnière, Gaël est enfin arrivé chez nous. Après six mois d’accompagnement par l’ASE (aide sociale à l’enfance), l’adoption plénière a été définitivement prononcée au tribunal. Aujourd’hui, nous sommes plus fatigués, mais comblés. Je ne vois pas de distinction entre notre famille et les autres familles. Nous vivons les mêmes difficultés et les mêmes joies que les autres.

Trouver des allié·es

Si je devais donner un conseil à d’autres couples dans la même situation que nous, c’est d’oser se lancer, il ne faut pas s’autocensurer. Aujourd’hui, bien qu’elle reste rare, l’adoption au sein de couples de même sexe se banalise. Il ne faut pas baisser les bras, même si c’est un chemin long et difficile. Je leur conseille aussi de s’entourer d’autres familles queer et adoptant·es en se rapprochant de groupes comme l’Association des parents gays et lesbiens (AGPL) ou le collectif Famille·s, dont je suis moi-même membre, et qui vise à « connecter, soutenir et faire rayonner les familles LGBTQIA+ », notamment via le Family Pride Festival.

La définition de la famille selon Nathan
Pour moi, une famille, ce sont des personnes qui tissent des liens entre elles, peu importe la nature de ces liens.

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Ce témoignage est un article de la série Adopter en féministe.
Découvrez les deux premiers articles de la série :

Amandine Gay : « Il faut sortir de la centralité du lien biologique. »
Accouchement sous X, un droit féministe ?

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Pour aller plus loin

🍿 In the family
Film de 2014.
De Patrick Wang, avec Sebastian Banes, Patrick Wang, et Trevor St. John.
Un père se bat pour conserver la garde de son fils adoptif après le décès de son compagnon.