Dernièrement, ne sachant me définir sur le spectre des féministes, je me suis présentée comme « féministe du doute ». En faisant des recherches, je suis tombée sur un article intitulé « Pour une phénoménologie féministe du doute », de Marie-Anne Casselot, philosophe.
D’après elle, il existe un doute typiquement féminin, qui vise nos propres capacités corporelles et intellectuelles, et provient de la socialisation genrée. Ce doute de soi est à la racine du syndrome de l’imposteur. Mais les femmes souffrent aussi d’un déficit de confiance lié à une présomption de faiblesse, d’incompétence, de mensonge etc. On doute d’elles autant qu’elles doutent d’elles-mêmes, ce qui alimente également le syndrome de l’imposteur.
Heureusement, d’après l’autrice, il existe un doute féministe qui permettrait de couper la chique au syndrome de l’imposteur. Il s’agit de « mettre en doute son propre doute » en trois étapes :
- Prendre conscience du doute de soi en tant qu’effet de la socialisation genrée ;
- Le rejeter, en gardant en tête que ce problème ne se règle pas avec des techniques de développement personnel mais plutôt collectivement ;
- Retourner le « système inégalitaire de distribution de la confiance » (passer de la mise en doute de la parole des femmes à une mise en doute collective de la parole dominante).
Devenir féministe, ce serait donc renverser le doute de soi pour adopter une posture de remise en question d’un système qui nous opprime.
L’autrice conclut par une mise en garde : si trop douter empêche d’agir, ne pas douter du tout empêche la réflexion critique. Elle donne l’exemple du « féministe blanc » qui, trop sûr de son fait, en est venu à écraser d’autres mouvements. Un doute féministe reconnaît que plusieurs individus peuvent souffrir différemment et souhaiter agir de différentes façons.
J’en conclus pour ma part que me définir comme « féministe du doute » est certainement une marque d’humilité mais aussi l’expression de mon syndrome de l’imposteur (je ne me sens pas légitime pour me positionner).